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Ce n'est pas tant que le pouvoir corrompt. Le pouvoir arase, il met tout en conformité à ses seuls intérêts. Les outils du pouvoir sont des outils de mise en conformité sociale et économique. Après le citoyennisme, le pacifisme et l'écologie responsable, c'est l'effondrisme et la collapsologie qui viennent semer la confusion dans l'esprit humaniste de nos contemporains, et servir de fait l'intérêt des productivistes, des extractivistes et des capitalistes.

Normalisation et confusionnisme

L'intérêt du peuple dans nos pays, est-il soluble avec l'intérêt de la circulation des biens et des capitaux ? Il s'agit toujours pour nos bienfaiteurs bénévoles et leurs soutiens sur le terrain d'accomplir le travail d'antichambre des préfectures, des ministères et des municipalités.

 

Souvent ces bénévoles placent loin, très très loin de leurs préoccupations militantes de proximité, les abjections de niveau international qui sont effectuées hors de leurs yeux (parfois par des membres de leurs familles, expatrié;e.s dans les ex-colonies, et c'est alors à ce prix qu'il n'y a pas guerre civile, chez nous)... Ces extractions de pétrole, de coltan, terre rare, de bauxite, d'uranium, d'or ou d'argent par des villages entiers et des enfants esclavagisés dans les pays d'Afrique et d'Asie, et que fuient les personnes qui le peuvent en se retrouvant dans le piège de camps de réfugiés HCR ou enfermées en centres de rétentions dans les zones aéroportuaires aux portes de nos pays européens... Pays qu'on dit riches, pays sous-développeurs.

 

« À CHACUN SON PAUVRE »

Un slogan tacite s'est ainsi insinué chez les militant.e.s d'associations, un slogan qui leur tient à cœur, et ce slogan est un pré carré qui donne la part belle aux autorités qui ont ainsi beau jeu de se défausser en utilisant cette manne.

« Vous défendez les gares », disaient à des usagers et des cheminots des représentants du Secours catholique à Cahors au cours d'une action de la CIMADE, « Mais nous ne sommes pas ici pour les gares, ou la défense du service public, nous sommes là pour défendre nos migrants (sic !... cqfd) ».

Il y a une privatisation de l'action sociale qui pervertit toute capacité de révolte efficace. Comment peut-on s'opposer ou renverser un pouvoir quand on obtient l'acquiescement non-dit des dirigeants ? À Nanterre ou ailleurs, un étudiant qui « parraine » (???) un exilé peut-il réellement avoir toute latitude pour contrer la présidence de l'université et le rectorat ? Idem pour les habitants de Montreuil qui hébergent certains roms ?...

 

Causes universelles, causes délaissées au profit du cas par cas

Où est l'universalité des causes ?... Ces pratiques servent-elles l'ouverture des frontières ? Appellent-elles à la désobéissance civile ? Protègent-elles efficacement la libre circulation des personnes et des idées ? Imposent-elles le droit d'installation des étrangers sur le territoire ?

Alors que, pendant ce même temps... Les puissances d'argent s'avèrent avoir bonne presse, aucune rédaction ne prendra le risque de dénoncer  pour les renverser les dirigeants du FMI ou de la Banque européenne, car aucun tribunal ne condamne jamais les parachutes dorés et les fuites vers les paradis fiscaux. Par contre... les facteurs de la fameuse « intégration » se confondent en collaborant (en coopérant) avec le pouvoir qui ne manque pourtant pas de persécuter les pauvres*.

 

Le temps des assassins

Oui, sont en réalité condamnés à mort les pauvres, les handicapés et tout.e.s c-ell-eux qui ne servent pas directement la production des biens nécessaires à la reproduction du système (même plus possible de nommer les bénéficiaires de cette machine mortifère, mais il suffit d'interroger l'actualité pour bien identifier les noms de nos dominants...).

Même c-ell-eux des classes autrefois moyennes ne sont plus "protégé.e.s" comme il-les le furent à la fin du XXe siècle en fRance, par exemple.
Ne nous y trompons pas, ce n'est plus une question de "classe" mais d'individus. Et nous disons bien "individus", pas "personnes". Les individus, là, sont déshumanisés. Indivis, bloc, masse en soi, informes, l'individu n'est pas une personne, n'est pas un sujet pensant et agissant, ne jouit pas de libre arbitre, n'est pas un être sensible. Réifié, l'individu n'a qu'une destination utilitaire.

Ainsi, soit l'individu est directement et immédiatement utile, soit il est éliminé.
Il reste peut-être encore des lieux où ils tentent de le rééduquer. Ici, ils prennent encore des gants en le laissant crever à petit feu, mais ça ne durera pas. Dans un futur très très proche, ils s'en débarrasseront directement. D'ailleurs, ne le font-ils pas déjà des personnes qui tentent de se réfugier, avec l'approbation silencieuse voire applaudissante de la masse des individus ?
En d'autres termes, ils rétablissent une autre forme d'esclavage. À sa grande époque, ils avaient besoin de nombreux esclaves et d'une masse productrice. Aujourd'hui, non. L'automatisation, la robotisation, la miniaturisation, l'intelligence artificielle, etc., permettent que relativement peu d'esclaves suffisent. Et puis, eux-mêmes sont si peu nombreux.

La masse est parfaitement inutile. Elle coûte. Il n'y a aucune raison de dépenser de l'argent pour ce qui est inutile. Ils l'éliminent.
La réécriture du "modèle français", les "réformes" pour lesquelles il-les ont voté plus ou moins en conscience – souvent plutôt moins, juste par ce qu'il faut "en être" (qu'“il faut bien faire quelque chose”, et qu'“on ne peut pas comme ça, sans rien faire”, n'est-ce pas ?) ce qui, comme toujours, signifie endosser l'habit du dominant, de son bourreau – le mettent en œuvre à une vitesse qu'aucun d'entre nous n'avait cru possible.

 

Le temps des abandons

En généralisant avec bonhommie les « parrainages républicains » (acte sans aucune validité légale), les mairies transfèrent volontiers aux particuliers la charge qui incombe à la société : suivre et accompagner une personne en grande nécessité.

De fait, dans leur légalisme béat la plupart des citoyens et des citoyennes sont tombée.e.s dans le panneau, le cœur et les bras grands ouverts et... les yeux fermés ! Nous n'avons pas vu le coup venir, il s'agissait rien moins pour les pouvoirs publics de refiler à leurs administré.e.s, flatté.e.s, la patate chaude de leurs devoirs : suivi psy et médical, traduction, scolarité, formation, insertion...

Même processus de privatisation galopante en parlant d'écologie responsable à échelle humaine, celle des particuliers, jamais à échelle institutionnelles, de la grande productions industrielle, de l'extractivisme, du productivisme...

Même démarche pour les soins et la santé : les patients sont priés de se soigner chez eux. Les hospitalisations en urgence s'étalent sur des heures entières d'attente, et la plupart des opérations chirurgicales ou des examens médicaux lourds se font « en ambulatoire », à savoir, un rapide passage devant leurs machines électroniques. On signe les protocoles et les décharges, pour se retrouver priés de retourner au plus vite chez soi poursuivre l'ablation des fils, les traitements, les piqûres, les lavages... Aux frais du privé ou de coûteuses complémentaires ! Et pourtant !... Les études révèlent et confirment que l'aide médicale d'État et la mutuelle de prise en charge (curieux terme, très culpabilisateur) seraient facteurs d'économie par la santé publique https://www.santelog.com/actualites/sante-des-migrants-pourquoi-il-faut-garantir-lacces-aux-soins-de-sante

Enfin, il y a lieu de s'inquiéter très très fortement de cette privatisation galopante de l'aide, de l'assistance, des soins et des secours. Chacun.e veut parrainer SON pauvre, son "migrant", son "rom", son "sans-papiers". Il s'en suit une incapacité totale à aider véritablement les gens, de fait polytraumatisés par les conséquences de nos lois restrictives, que ce soit au niveau toujours insuffisant des individus ou au niveau général des institutions publiques. Les étudiants de Nanterre avec les réfugiés, les habitants de Montreuil avec les roms, les habitants de province avec leurs enCADAssé.e.s.... L'État et les pouvoirs publics se défaussent et nous, personnes du terrain, nous nous écharpons entre nous.

 

Lieux du ressaisissement

Contre le lobby implicite qu'ont subrepticement institué les associations et les mouvement à vocation humanitaire ou caritative, il y a lieu de tenir ferme. Résister, ne pas céder à leur fascination des notables. Le but qu'il nous faut toujours garder en tête est d'arrêter le bras qui frappe (police, administrations municipales, régionales ou préfectorales, centres de rétentions, jugements en référés, tribunaux d'expulsion...). Et ces organismes se sont faits une spécialité de procéder au tri des “assimilables**”, autrement dit, de ceux que l'on peut récupérer au bénéfice de nos emplois et de nos villes, de nos campagnes . 

Rivées sur la prétendue modestie du terrain, les préoccupations localo-localières et localistes préfèrent ignorer les débordements de leurs grandes familles. Les bonnes âmes prétendent qu'il s'agit d'une autre question, alors qu'à l'évidence nos grandes fortunes monétaires sont toujours fondées sur l'accaparement des terres, qu'elles soient étrangères ou intérieures à nos frontières, comme on le voit avec les grands projets inutiles imposés auxquels se sont opposées certaines ZADs comme celle de NDDL ou de Sivens. 

Une des ressources serait de faire des réels procès, devant la Cour européenne de justice. Est-ce que les États généraux des migrations s'y coltineraient ?

 

 

Notes :

*« pauvres » : toute personne en situation d'extrême précarité, en perte de droits, ou ayant perdu ses droits (déshérité.e.s, roms, exilé.e.s, sans-papiers, handicapé.e.s, prisonnier.e.s, demandeurs, demandeuses d'asile, sans-domicile-fixe, sans -abri, mineurs et mineures isolé.e.s, etc.).

** “assimilables” : personnes bien sous tout rapport aux yeux des autorités, comme les indics, les familles avec enfants, apprenant la langue, appliquées à reconnaître les marqueurs de la nation (la Marseillaise, la devise égalité-etc., le drapeau tricolore, et les mythes revendiqués de la terre d'exil, de la déclaration des droits humains, du catholicisme et de nos ancêtres les gaulois).

Jean-Jacques M’U et Sophie Lauys
Le 17 octobre 2018

 

Tag(s) : #Privatisation de l'humanitaire, #Normalisation sociétale, #EGM, #Politique migratoire, #Santé et précarité, #Collaborationnisme des caritatifs, #Collapsologie, effondrisme et catastrophisme, #Loin des yeux loin du cœur ?
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